
Jésus-Christ est Il pleinement Homme ?
Jésus-Christ, en tant que seconde personne de la Trinité, est pleinement Dieu. À première vue il semble alors ne pas pouvoir se dire de Dieu qu'Il est Homme, car on ne peut pas dire de deux choses de natures différentes qu'elles sont égales: par exemple on ne peut pas dire qu'un chien est un chat.
Cependant, en la personne du Christ, la nature divine et la nature humaine sont réunies par le mystère de l’Incarnation dans un seul et même sujet. Le mot qui désigne une nature peut se dire véritablement de tous les sujets de cette nature: on peut dire de personnes différentes, comme George Clooney ou Victor Hugo, qu'ils sont un Homme. Et puisque la seconde personne divine, par l'Incarnation, est un sujet de la nature humaine, on peut alors dire que le Christ est véritablement et pleinement Homme.
En la personne de Jésus-Christ, la nature divine et la nature humaine existent de manière inséparable. Ainsi Il est pleinement Homme, car Il possède un corps, une âme, et tout ce que nous avons dans la nature humaine en dehors des imperfections, et il est aussi pleinement Dieu, parce qu’Il est de même nature que le Père.
Est-il raisonnable de dire que "Dieu s’est fait homme"?
À première vue, cela ne semble pas pouvoir se dire : "Se faire homme" suppose un changement, et il ne peut y avoir aucun changement en Dieu, qui est un être Éternel, Parfait et Absolu.
"Être fait" implique que l’on dise d’une chose ce que l’on n’en disait pas auparavant. Cependant, il y a deux façons par lesquelles on peut dire d'une chose ce que l’on n’en disait pas auparavant:
-Le changement de la chose elle-même (Pierre se déplace et se retrouve à la droite de Paul)
-Le changement d'une autre chose (Paul se déplace à la gauche de Pierre, et Pierre se retrouve à la droite de Paul, sans avoir bougé)
Dans le deuxième cas, le changement se produit non pas par la chose elle-même, mais par le changement d’un autre. C’est pourquoi il est possible de dire de Dieu qu’il s'est fait Homme, sans qu’il n'y ait de changement de Sa part, mais par le changement de la nature humaine qui est prise pour être unie à la personne divine.
La seconde personne de la Sainte Trinité a toujours existé, depuis toute éternité, avec le Père et le Saint-Esprit. Il n'a pas toujours été Homme, mais tout en devenant pleinement Homme lors de Son Incarnation, il n'a jamais cessé d'être pleinement Dieu. Et puisque l'on peut dire de Dieu, non pas de toute éternité, mais dans le temps, qu’il est Homme, on peut vraiment dire que “Dieu s’est fait Homme”.
Les choses qui se disent du Christ en tant qu'Homme peuvent elles se dire de Dieu ?
La nature humaine contient des défauts, par exemple la souffrance ou la mort. Pour certaines personnes, il semble que ce soit un blasphème que d'attribuer a Dieu ce qui appartient à un défaut, et que les choses qui appartiennent à la nature humaine ne peuvent alors pas se dire de Dieu.
Si l’on attribuait à la nature divine ce qui est un défaut, ce serait un blasphème. Mais il n’y a rien de blasphématoire si on l'attribue a Dieu par rapport à la nature humaine qu’il a prise.
Dieu, par Son Incarnation, a pris librement ces défauts pour nous sauver. Jésus-Christ n'a jamais commis de péché, et pourtant nous Le voyons souffrir de nombreuses conséquences du péché. Il n'a pas pris chaque défaut humain particulier, mais seulement ceux comme la faim, la soif, la douleur et la mort, qui découlent du péché commun de toute la nature humaine, et qui l'aident à accomplir le Salut pour lequel Il est venu.
On dit que quelque chose appartient à la nature humaine lorsque tous les êtres humains la possèdent. Tous les êtres humains peuvent ressentir la faim, la soif ou la fatigue, mais tout le monde n'a pas, par exemple, un mal de dos ou une mauvaise vue. Ces choses ne sont pas communes à la nature humaine, ce sont le résultat d'imperfections dans notre corps. Jésus-Christ a un corps humain semblable au nôtre en toute chose, en dehors des imperfections.
Dans la personne du Christ, la nature divine et la nature humaine sont réunies dans une seule et même personne, et c’est de la même personne que l'on parle sous le nom de l’une et de l’autre. C'est pourquoi ce qui se dit du Christ, soit par rapport à la nature divine, soit par rapport à la nature humaine, peut se dire de Dieu aussi bien que de l’Homme.
Ayant établi que Christ est pleinement Dieu et pleinement Homme, comment parler de Dieu?
On veut être capable de bien parler de Dieu, mais il est facile de se tromper. Même en étant prudent, on peut se retrouver à pencher vers l'arianisme (qui ne reconnaît pas la divinité du Christ), l'apollinarisme (qui pense que Jésus n'est ni vraiment Homme, ni vraiment Dieu) ou le nestorianisme (qui ne reconnaît pas l'union des natures divine et humaine dans le Christ).
Saint Thomas d'Aquin nous donne quelques indications pour parler de Dieu, que l'on appelle la communication des idiomes. Il y a deux règles de base :
1- On ne peut pas attribuer des propriétés de la nature divine directement à la nature humaine, et vice-versa. On ne peut pas dire, par exemple, que la divinité meurt, ou que le corps humain du Christ est omniprésent.
2- On peut attribuer des propriétés de la nature divine a un sujet concret, même si le nom de ce sujet est dérivé de la nature humaine, et vice-versa.
La raison est qu'en Jésus-Christ, il n'y a qu'une seule personne en qui sont unies les deux natures, et le nom de l'une ou l'autre nature renvoie à Lui. Que l'on dise Homme ou Dieu en parlant du Christ, on désigne la même personne divine. On peut alors dire de l'Homme ce qui appartient à la nature divine, et on peut dire de Dieu ce qui appartient à la nature humaine.
Par exemple, on peut vraiment dire que "Dieu est mort sur la Croix". "Dieu" nomme ici un sujet concret, en qui existent les natures divine et humaine. Même si le nom de Dieu est dérivé de la nature divine, il désigne ici le sujet concret, la seconde personne divine incarnée. Et parce que ce sujet concret possède la nature humaine, et qu'il a subi la mort dans son humanité, on peut véritablement dire que Dieu est mort pour nos péchés.
C'est aussi la raison pour laquelle la Vierge Marie est appelée mère de Dieu: parce que Marie a donné naissance à la personne divine en qui sont unies les natures divine et humaine, on peut véritablement dire qu'elle est la mère de Dieu.
L'union des natures divine et humaine dans le Christ se manifeste à travers toute Sa vie terrestre. Par Son Incarnation, Dieu agit dans le monde d'une manière toute particulière, car dans la personne du Christ, l'action humaine est l'instrument de l'action Divine: Jésus guérit par un toucher, enseigne par la parole, et sauve en mourant sur la Croix.